Manifeste affirmant le caractère un et divers de la langue d'Oc

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Philippe MARTEL

#97 Deux ou trois trucs sur l'occitan.

2012-09-03 18:39

-Quand on discute avec des locuteurs natifs de la langue d'oc/occitan etc, on s'aperçoit qu'ils disent simultanément deux choses : a) on parle pas pareil que les gens du village d'à côté. b) Au service militaire, avec les gens de... (à plusieurs centaines de kilomètres) on se comprenait, parce qu'on parle pareil. Ce qui veut dire que si ces gens n'ont pas dans leur besace le vocabulaire "occitan", langue d'oc, etc. mais seulement "patois" parce que c'est toujours comme ça qu'ils ont dit, ils n'en ont pas moins, empiriquement, la conscience de l'unité des parlers du "Midi". Simplement, ils ne la théorisent pas.
-On subit le poids de la tradition française en matière d'identification de ce qui est une langue et de ce qui n'en est pas une : la "langue", c'est le truc standardisé avec son orthographe, sa grammaire, ses académiciens, et surtout son Etat tutélaire. Ce qui n'est pas ça, ce n'est pas une langue, c'est un patois. Face à ces certitudes officielles, deux pièges possibles pour les gens qui s'intéressent au développement de notre langue : soit faire comme ceux d'en face (inventer une langue unifiée toute jolie, où rien ne dépasse, comme si il y a avait un Etat pour la propager (seulement, ben, y en a pas, d'Etat, et on est pas près d'en avoir un) Soit suivre le parcours du chien crevé au fil de l'eau, et accepter l'idée que ben oui, puisque ça change, c'est forcément plein de langues qui n'ont rien à voir les unes avec les autres, enfin pas plus qu'avec d'autres langues "latines", comme dit l'autre. On peut aussi sortir du piège tendu par l'idéologie dominante, et concevoir que le fait que ça change de village en village, ce n'est pas grave, puisque plus ça change, plus c'est quand même fondamentalement la même chose. Quand ça cesse d'être la même chose, puisqu'on ne comprend plus c'est qu'on est chez les Berrichons ou les Poitevins, ou chez les Francoprovençaux, ou chez les Piémontais, etc. L'occitan au singulier, c'est donc chacun des parlers de l'espace linguistique d'oc.
-Il faut être très naïf pour s'imaginer qu'il suffirait de revendiquer des CAPES de "provençal", de "béarnais", de cévenol, de "champanastaien" etc. pour que le ministère les accorde. On aurait plutôt tendance, là haut, à considérer que cette histoire est un bâton brenneux, et qu'il vaut meiux ne pas s'en occuper. La plupart des enseignants de provençal actuels, en PACA, ont passé le CAPES d'occitan langue d'oc, ne se sont pas posé tant de questions, et n'en sont pas morts. On aimerait, soit dit en passant, revoir des candidats provençaux au CAPES parce que ça fait des années qu'on n'en voit plus. Mais forme-t-on des candidats, là bas ?

Réponses

Realista

#99 Re: Deux ou trois trucs sur l'occitan.

2012-09-03 23:07:45

En théorie, l'intercompréhension c'est très bien, mais dans la pratique c'est un peu différent: IL N'Y A PAS DE FRONTIERE DEFINITIVE d'une langue à l'autre (dans la même famille, bien entendu), et pas plus entre l'occitan et le français qu'entre le provençal et le "non-provençal": sinon pourquoi les cartes de l'Occitanie dessinent-elles un Croissant qui est comme un no man's land entre français et occitan? Et la frontière entre occitan alpin et francoprovençal, elle est vraiment nette ? (là Philippe Martel doit en savoir quelque chose, vu que c'est son parler d'origine)

Parce que c'est quoi, une frontière? C'est un ensemle de critères, ou un seul? Et si c'est un ensemble, il y a peu de chance que toutes les limites (isoglosses) se recoupent, donc on a des zones intermédiaires... comme le fameux Croissant. Vers le nord de l'Ardèche et de la Drôme, il y a des parlers "bizarres" vus de l'Occitanie profonde et standardisatrice, on y emploie des pronoms sujets, c'est pas très catholique (ou pas très orthodoxe, selon votre foi). C'est là qu'intervient (ô miracle) la seule foi qui vous sauve, celle du charbonnier: il suffit de décider que "le francoprovençal on comprend pas" et tout est joué! Sauf que le Gascon (ou le Béarnais?) c'est cent fois plus difficile à capter que le francoprovençal (que Mistral classait comme "provençal", lui, cf. son TDF)

Bref plus on avance et moins on fait de chemin, et l'occitan reste une nébuleuse au travers de laquelle seuls ceux qui ont la foi peuvent se diriger...#97: Philippe MARTEL - Deux ou trois trucs sur l'occitan.