Sauvons les Serres d'Auteuil

Bruno Zlonyk

/ #7427 Sauvons les Serres d'Auteuil !

2014-06-25 17:05

Un mégaphone pour Lise Bloch-Morhange, porte-parole du Comité de soutien des Serres d'Auteuil !

Un deuil impossible déjà celui des magnifiques pergolas : assises sur un banc, d'un livre méditant un espace au-devant, ou marchant deçà, delà à balancer aux bras d'aucuns, d'aucunes en étaient littéralement amoureuses. Qu'il s'en passait d'ombreuses intrigues sous ces allées à jamais altérées d'ailes et de feuilles !

Après l'oubli, peut-être, pour d'aucunes ou d'aucuns, de « ces allées à jamais altérées d'ailes et de feuilles », afin d'éviter qu'un pavillon – nouvel enjeu – soit transformé en un court de tennis, offrons l'appui d'une signature :

À Madame la commissaire-enquêteur, à la Fédération Française de Tennis, à la Ville de Paris, à Madame la ministre de l'Environnement et à Monsieur le maire du XVIème arrondissement de Paris.


Pavillon des azalées

Chevalet chromatisé
de clôture omoplate
chevalier d'os et d'or-poumons
pour une octave oblate

cœur absent si chevauché
de bois et d'aquarelle
sous la biométrie du geste
fleurit verte la main


colonne ville vertébrale de ses feuilles
aux phalanges de phasmes
colombe vive chaux de ses feux froissée
il est très clair il est très lumineux
plein de soufre
dans cet espace de vent et de verrières
piano robe de soirée Yamaha de pie à queue
masque de chèvre verte
tout l'espace investi d'esches fanées

la métamorphose d'une serre en un court
pour ce jeu enkysté
ces œuvres et ces exécutants
qu'il faudrait applaudir
sur des écrans géants de 65 m2

les paumes serrées sur des raquettes en tournois
vitesse de la balle et rebonds
le profond laxisme aqueux des élus locaux
ces gens-là dont l'apnée est dévote
rose de l'élytre podologue sèche l'air
cléome étrangement astralisé dans le végétal
flèche des gousses engoncées de goût
sur la petite marguerite en appeau

lourdes sont les ailes ici là
perroquets du costus à clavier claviger
langue à gober la glaire sous la graine


Auteuil

nous avons ce jour perdu
par grand vent la protection des plantes
d'eau et d'ombres d'ombres et d'air
la pergola permettait en effet
d'intérioriser les arbres
même en plein soleil c'est ça
que nous a pris la différence

un ciel violent d'éveil au bord d'ardoise
travesti d'exquise pâleur du pollen musical
le vert de la prairie fût rouillé bidonville et gradins
une abeille trapéziste sur un tradescantia

nous ne dirons pas le nid fut violet d'onyx
nous ne dirons pas non plus

épiphyte tes langues d'élan
frondes d'astuces stériles au suc de serpent
partout le public supplétif de Roland-Garros verra
son dieu balle de pollen très ravi suspendu
d'avant la chute suivante au paradigme
du redécouvert

envoi (avec air initial)

blond duvet de la nuit papille de langue où
la glu du végétal est source de tissus
par les sutures de l'ouïe
les bourgeons germent du visuel hiver
sur la langouste verte

la métamorphose du pianiste en archange
pour ce jeu d'ailes déployées

ces œuvres et ces exécutants
qu'il faudrait regrouper
sur les jardins d'un hiver virtuel
de siniste mémoire


À la lectrice, au lecteur, à la personne morale, à l'association X, au collectif Y : même s'il est d'abord un site de préservation et de pédagogie, le domaine des Serres d'Auteuil se dédie parfois aux arts, qu'ils soient d'inspiration musicale ou de chevalet. C'est également un juste moyen de se ressourcer : espace hygiénique, convivial, c'est-à-dire, au sens fort, sanitaire et social, c'est souvent un lieu de rendez-vous familial, amoureux, amical. Éditer permettrait de faire don des avoirs éventuels – revue ou recueil – à son Comité de soutien. En effet, parce que demain c'est aujourd’hui, mais aussi parce que, tissées d'histoires et de mémoires, les Serres d'Auteuil appartiennent avant tout à ceux qui les aiment. Et qu'il ne peut être question maintenant de perdre le moindre pavillon pour un va-et-vient de pollen falsifié en balle de tennis ! Alors : un livre ouvert, avec signet, ou un court clos avec filet ? Pour parfaire une œuvre commencée par le Comité de soutien des Serres d'Auteuil, nous adressons ce message aux plumitifs associés, pastellistes, photographes – et autres amis des arts et des jardins : pourquoi ne pas compléter ce geste et se fédérer, à titre patrimonial, afin de concevoir un ouvrage illustré – pastels et autres techniques, poésies, nouvelles, témoignages ? Ce serait là une façon durable de dire : « Non ! Pas l'unique saison de la bétonnière portée ni de la banderole Mesh, qui permettent chacune aux investisseurs et aux élus de prévoir à quelle hauteur d'un ciel falsifié monteront les gradins de la lumière et de l'éclat des écrans du spectacle ! » Hier l'or était la rareté, aujourd'hui c'est de préserver le cadre de la vie dont il s'agit. Donc, par tous les moyens, dont celui de l'édition de qualité, portons à même hauteur notre refus définitif, afin qu'on puisse évaluer un niveau de vote pour les seconds, et, pour les premiers, leur permettre une réévaluation de la juste « valeur » de leurs comptes ! Parce qu'il n'y a que quatre saisons, lorsqu'on oublie celle du cœur : celle propice à la méditation, avec support ou non, selon Maurice Merleau-Ponty, de signes littéraux, celle qui engage à la circulation du pas, sous les haleines blanches, pour remplacer ces feuilles en allées de Paul Verlaine, celle de la fermeture et du regret, de l'attente aussi d'un autre son de cloche, avec les pavés de l'ancien Paris assassiné de Louis Chevalier, celle des cris et des jeux des enfants de Robert Desnos, de la recherche de l'eau et de l'ombre, aussi. Pour transcender ces quatre saisons, allons plus loin dans la cinquième, qui est aussi celle du courage et de l'action. Autrement, un pavillon qui n'est pas que celui d'une oreille pleine de l'écho des balles du pollen s'en ira et ce sera comme de voir une amie perdre son premier mouchoir, puis ses bottines, etc., non pas pour lui baiser le cœur et les mains, mais pour le vendre au plus puissant, au mieux offrant. « À mesure que ces existences disparaissent, les rêves s'en vont. J'ai bien éprouvé cela pour ma sœur, pour cette femme charmante dont je ne parle jamais par une pudeur de cœur qui me clôt la bouche. », écrivit à minuit, le 9 juin 1852, Flaubert à Louise Colet.



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Nous ferons la promotion de cette pétition auprès de 3000 personnes.

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