l'Algérie va t'elle récupérer ses bien archéologiques?

L’Algérie va-t-elle récupérer ses biens archéologiques ?
Par : Mohamed-Chérif LACHICHI

Examinée lundi à Tunis l’affaire des pièces archéologiques volées et  retrouvées au domicile de Sakhr El-Materi à Hammamet a été reportée au 5 janvier.  Le gendre de Ben Ali, objet d’un mandat d’amener international, est inculpé, d’après une dépêche de la TAP pour « trafic de pièces archéologiques, transfert illicite d’immobilier protégé, possession de pièces archéologiques non-déclarées, et fouille de ruines mobiles et fixes sans permis ». Parmi les 164 pièces découvertes,  figure singulièrement  « Le masque de la Gorgone » un objet  archéologiques d’une valeur inestimable volé en Algérie sur le site d’Hippone, actuelle Annaba.  Et ce n’est que grâce à un reportage d’une télévision satellitaire réalisé dans le palais de Sakhr El-Matri à la suite de la chute du clan Ben Ali que la tête de la Gorgone qui ornait jadis une fontaine publique de la ville antique a été repérée fortuitement par l’ancien conservateur du musée d’Hippone, en l’occurrence M. Saïd Dahmani, aujourd’hui,  à la retraite. Le reportage portait sur un inventaire des biens mobiliers et immobiliers, propriétés de la fille aînée de Zine el Abidine Ben Ali.  Le Masque de la Gorgone  avait disparu dans des conditions obscures en 1996 en pleine décennie noire, une période durant laquelle un pillage en règle a été mené. Une autre douloureuse saignée pour l’Algérie.  Enfin, des dizaines de pièces de mosaïque, des poteries, des artefacts et des statuettes sont, à ce jour, portées disparues.  Mais le vol plus spectaculaire est très certainement celui du Masque de la Gorgone. Jugeons en : l’objet en question était plus qu’imposant.  Sculptée dans du marbre, la pièce a une hauteur d’environ un mètre et pèse pas moins d’une demi tonne. Il était donc impossible que cet objet ait pris des ailes pour quitter l’Algérie sans qu’il y ait nécessairement des complicités locales. Mieux, les services de sécurité ont soupçonnés, à un moment donné,  l’existence d’un puissant réseau implanté à l’est du pays. Compte tenu de la proximité de la frontière tunisienne, beaucoup estimaient notamment à Annaba que nombre des pièces volées dans la région prenait la destination du pays voisin considéré, non sans raison d’ailleurs, comme un véritable plaque tournante du trafic d’objets archéologiques.  Il faut savoir qu’à la même période du vol de la tête de la Gorgone, neuf têtes de Septime Sévère avaient disparues du Théâtre antique de Guelma, l’ancienne Calama.  50.000 pièces de monnaies en bronze avaient été subtilisées à Souk Ahras.  Faute d’une politique publique visant à sauvegarder ce patrimoine plusieurs fois millénaires, les vols sur les sites archéologiques n'ont toujours  pas cessés. Certes, l'Etat a manifesté plusieurs fois sa préoccupation en soulignant à chaque fois sa détermination à lutter contre le marché illégal des œuvres d'art et des biens culturels etc, etc.  Il faut retenir que les responsables en charge de la sauvegarde  de ce patrimoine semblent se complaire surtout dans le constat. La ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi a toujours reconnu, elle-même,  que  le patrimoine algérien était menacé. De même qu’elle n'a jamais cessé de déplorer la situation  des musées algériens insuffisamment protégés et qui ne répondent pas aux normes internationales, etc, etc. Mais dans le cas précis de la tête de la Gorgone, il s’agit d’apporter  très vite une réponse ponctuelle et surtout opérationnelle en vue de sa restitution.   Car si le mystère de sa disparition  est enfin résolu, près de quinze ans après, la ministre de la Culture, n’en est pas moins appelée instamment à récupérer, au plus vite,  l’objet retrouvé chez la fille du dictateur déchu.


Baba Merzoug retrouvera-t-il le chemin d'Alger ?
par Pierre-Henri Allain

RENNES (Reuters) - Un canon mythique ayant longtemps défendu Alger avant d'être installé en 1830 dans l'arsenal de Brest fait de nouveau couler de l'encre sur les deux rives de la Méditerranée.

Appelé "Baba Merzoug" par les Algériens et "la Consulaire" par les Français, cette énorme pièce d'artillerie en bronze de douze tonnes et sept mètres de long pourrait en effet être restituée en 2012 à l'Algérie à l'occasion du 50e anniversaire de son indépendance, affirme-t-on à Alger.

"J'ai écrit à de nombreuses personnalités dont certaines, comme l'ancien président Jacques Chirac, m'ont répondu favorablement et j'ai aussi reçu un accord de principe de l'Elysée", affirme l'historien algérien Belkacem Babaci, fondateur d'un Comité pour le retour du canon en Algérie.

"Mais, à la veille de l'élection présidentielle en France, nous ne voulons pas que cela gêne le président actuel", ajoute l'historien, joint par téléphone et qui regrette la publicité faite ces derniers temps autour de cette affaire dans les médias algériens.

"Si nous sollicitons la magnanimité du gouvernement français, c'est avant tout, à l'occasion des commémorations de l'indépendance de l'Algérie, comme un geste d'amitié confortant la reprise de relations plus fraternelles entre nos deux pays", explique Belkacem Babaci, auteur de "L'Epopée de Baba Merzoug" aux Editions Colorset.

Pour l'heure, la Marine nationale n'envisage pas toutefois de se séparer du célèbre canon, qui se dresse sur la rive gauche de la Penfeld, dans l'enceinte de l'arsenal de Brest (Finistère), fixé sur un socle de granit et surmonté d'un coq posant sa patte sur un globe terrestre.

"Nous n'avons reçu à ce jour aucune demande officielle concernant la Consulaire", a déclaré à Reuters Marc Gander, porte-parole de la préfecture maritime à Brest.

"Nous ne sommes d'ailleurs que dépositaires de ce monument et je pense qu'une demande devrait davantage s'adresser aux ministères des Affaires étrangères et de la Culture plutôt qu'au ministère de la Défense", a t-il poursuivi.

UN CANON TERRIBLE

Fondu en 1542 par un Vénitien pour défendre la baie d'Alger, ce canon, d'une portée exceptionnelle de 48 km, donnera durant près de deux siècles à la capitale algérienne la réputation de forteresse imprenable.

Il enverra également "ad patres" deux consuls français, le révérend père Jean Le Vacher puis André Piolle, tous deux placés à l'extrémité du canon en guise de représailles après les attaques perpétrées par l'amiral Duquesne en 1683 puis par le maréchal Jean d'Estrées en 1688.

Ces deux épisodes de l'histoire de Baba Merzoug lui vaudront d'être rebaptisé "La Consulaire" par les Français.

En juillet 1830, dès les premiers jours de la chute d'Alger, la fameuse pièce d'artillerie est saisie et expédiée comme trophée de guerre en France par l'amiral Guy Duperré qui demande son transfert à la base navale de Brest pour sa participation à la campagne d'Alger.

"C'est la part de prise à laquelle l'armée attache le plus grand prix", écrit-t-il alors.

En Algérie, un premier comité réclamant le retour de ce "prisonnier de guerre" dans son pays d'origine voit le jour en 1999, à l'initiative de Belkacem Babaci.

En 2006, Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la Défense, avait coupé court aux sollicitations, affirmant que le canon faisait "partie intégrante du patrimoine historique de la défense" et soulignant "un attachement particulier" de la marine pour ce monument.

Cinq ans plus tard, malgré les promesses qui ont pu être adressées à Belkacem Babaci, les autorités françaises ne semblent guère davantage disposées à s'en séparer et rappellent qu'il se dresse maintenant depuis des décennies dans l'enceinte de la base navale de Brest et figure même sur certaines cartes postales de la ville.

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